Expérience japonaise n°2 : boire une bière dans un bar bouddhiste

Le deuxième soir de notre séjour à Kyoto, nous avions rendez-vous avec Junko et deux de ses collègues. Junko travaille en effet à Kyoto, dans la boutique Kyoto Design House, qui met à l’honneur des créations d’artistes de la région : tissus, papeterie, vaisselle, maroquinerie…
Nous nous donnons rendez-vous au magasin, où l’on admire ces petites merveilles.

Aujourd’hui, si t’as pas un mur de béton ciré dans ta boutique, ton corner design n’en est pas vraiment un

Il a fallu que je fasse mine d’être intéressé. Jveux pas fâcher

Comprends mon désarroi, franchement, rien à fout’ des sacs minimalistes

Et pis les ptits bonshommes en papier à 60 balles, jm’en tamponne bien sec

Et pis mon dernier cours de théâtre remonte au CM2…

…alors généralement, pas besoin d’être Madame Soleil pour voir que j’en ai rien à fout’

Après un dîner rapide dans un snack du coin, Junko nous emmène dans un lieu improbable et confidentiel : le Kyoto Monk Bar.

« Tu veux pas qu’on s’ambiance un peu avant d’aller dans ton bar à hôtesses ? »

Il s’agit d’un bar tenu par des moines bouddhistes, le soir uniquement.
Pour commander, il faut se servir d’un petit bol chantant. Le serveur arrive à pas feutrés et prend votre commande avec déférence, comme dans un grand établissement.
J’y ai goûté du très bon vin rouge japonais et Alex de très bonnes bières : ça les moines s’y connaissent en boisson.
Le prix n’est pas donné : il faut payer 5€ rien qu’en droit d’entrée (c’est une pratique courante au Japon).
Mais l’insolite de l’endroit valait bien le prix, et c’était un cadre parfait pour pouvoir discuter longuement avec les collègues de Junko.

En France comme au Japon, le clergé aime la picole. Reste à savoir s’ils aiment aussi les enfants ici

« Ils vont pas m’saouler avec leur bol. Hé ! Garçon ! »

Ce jour-là, j’ai mis ma raie de l’autre côté. Ils étaient trop impressionnés. C’est ça, la mode

Son collègue Rob, Américain installé depuis plusieurs années au Japon, est tombé amoureux de Kyoto lors d’un voyage au lycée et n’a eu alors d’autre but que d’y vivre.
Originaire de Kyoto, Chikage, l’autre amie de Junko, a toujours vécu dans cette ville et y est très attachée. Sa famille tient une fabrique artisanale de kimonos et les traditions ont donc une importance particulière pour elle.

On ne pouvait rêver meilleure compagnie pour comprendre la magie de Kyoto et le charme qu’elle peut exercer sur certains. En discutant avec eux, on a vraiment ressenti l’amour qu’ils portaient à cette ville… et c’est contagieux ! En sortant du bar, l’effet des breuvages bouddhistes faisant peut-être effet, on se surprend à être plus sensibles à ce qui ne nous sautait pas aux yeux avant : l’architecture traditionnelle des maisons, la luminosité tamisée des rues, la verdure omniprésente et le calme ambiant… . Ca y est, on est amoureux !